Si Auroville est une secte, et bien je m’en suis bien sorti. J’ai n’ai pas eu à participer à des séances de spiritisme en l’honneur d’un clown en toge jaune fluo, ni à virer mon codevi sur un compte en Suisse pour participer à l’amélioration des relations Aurovillo-Saturniennes et encore moins à refiler un rein et mon passeport pour prouver ma foi en la médecine Ayurvédique.
Bien sorti donc, quelques jours, par chance, au sein d’une communauté, ce qui contrairement à ce que certains pourraient penser, n’est pas une sorte de repère de glandeurs soixante-huitards fumeurs de hash mais plutôt un réel effort de citoyens du monde à s’unir pour vivre en paix et dans le respect de leur environnement. Hollandais, Russe, Français, même un mec du Kazakstan, la plupart profs pour les enfants de la ville ou chercheurs en énergies renouvelables, solaire principalement, un secteur où Auroville s’investit beaucoup.
Évidement, le tourisme reste une des sources de revenu majeure, au grand dam de certains qui y voient une contradiction avec le principe de participation de chacun, mais la plupart, au contraire, savent que la visite des voyageurs est un moyen de véhiculer les idéaux et aussi quand même un moyen de ramener de l’oseille.
Personnellement, je le conseille donc à tout le monde qui passera dans le coin, mais ne vous attendez pas à ce que les Auroviliens vous attendent les bras ouverts, avec une pancarte de bienvenue, un grand sourire, de la musique et des ballons, ça nan, vous serez parqués dans un des nombreux guest-houses et ne croiserez peu ou pas les Auroviliens, blasés des allées et venues des uns et des autres et occupés à la progression du projet Auroville. Un soir, je rentre à la communauté, passe par la cuisine et croise trois d’entre eux en train de préparer l’implantation d’un centre d’information en Russie. Après quelques minutes et autant de questions posées à l’un et à l’autre, ma curiosité est priée de rester là où elle est et de bien vouloir les laisser continuer cette conversation réellement plus importante que les questions futiles et redondantes d’un autre guest de passage.
Mais ce qu’il faut retenir d’Auroville, située au milieu de la foret Tamoul, c’est une flore luxuriante et une faune tout aussi surprenante, qui donne vraiment pas le mal du pays.
Parqué avec les autres guests donc, je finis mon séjour entre Pondi et Auroville, avec fière allure au volant de ma mob à sacoches et malgré la circulation chaotique des rues et routes Indiennes. Après deux mois d’observation, je ne saurais pas dire si la priorité est à gauche ou à droite, elle semble être donnée aux animaux puis aux gros véhicules, bus et camion, aux voitures chères type Mercedez ; et à taille et valeur équivalente, à celui qui roule le plus vite ou klaxonne le plus fort. Car il faut le savoir, le klaxonne c’est la première langue officielle de l’Inde. Et puis bon, sans panneaux, lignes, ni feux il faut bien se débrouiller et se rappeler que la taille de sa file est inversement proportionnelle au nombre et à la taille des véhicules qui se trouvent dans l’autre file, que rouler à contre sens est tout à fait acceptable et que doubler est dans toute situation permi à tous, à savoir, piétons, vélos, scooters, chariots, carrioles, voitures, camions, bus et animaux.
Mais cela semble pas trop mal fonctionner, comparativement aux risques d’une telle configuration et malgré la frénétique envie de vitesses de certains agressive drivers, c’est finalement les occidentaux qui sont le réel danger imprévu, car la priorité se donne ou se laisse selon une certaine compréhension mutuelle qui fait parfois défaut entre deux cultures différentes.
Dans deux jours mon pom’ arrive à Bombay, alors je check out de mon guesthouse dans la matinée, rends ma meule et me fais prendre moi et mes 15 kilos de sacs à dos derrière le scooter en peine du mécano jusqu’au bord de la ville. Je stoppe le bus pour Chennai, vers midi, après 4 heures de route je me pose au gigantesque Mofussil terminus pour manger sur un coin de banc en speed et file à l’aéroport, largement en avance pour mon vol de 18h15 to Mumbai avec Air deccan, le low cost à l’indienne. Entre les bousculades avec les clients et l’ignorance assumée du staff, je parviens à m’informer, le vol est fully booked, et l’espoir que quelqu’un se désiste est mince. Prochain vol à 5 du mat’ dans 15 heures, soit, je le prends et puis on the bright side j’arriverais pas à minuit à Bombay sans savoir où aller, mais à 7h du mat’ sans savoir où aller, ce qui améliore nettement les chances de ne pas se paumer.
S’en suivent donc 15 heures finalement assez sympas à l’aéroport, entre les négociations avec les gardes peu enclins à me laisser entrer l’aéroport pour un vol le lendemain, les discussions sur les bancs de salle d’attente et la chance de pouvoir pirater un réseau wifi qui m’accorda un accès au téléphone et à l’internet, je prend donc mon vol en m’étant tenu éveillé overnight.
Je me renseigne avant de sortir de l’aéroport, un conseil que je donne au passage, toujours lire un peu son guide et faire un tour au tourist information avant de se jeter en pâture à la foule d’attente à la sorti de l’aéroport, ne serait-ce que pour savoir à peu près vers quel coin aller et comment. Je me décide pour le train, et marche jusqu’à Ville Parle, déjà un peu dans le gaz. C’est grand Bombay me dis-je au milieu des 40 minutes de train, je suis dans un wagon de 20 m2 avec une bonne centaine de voyageurs, tous indiens, debouts, assis, pendus aux poignets et accrochés dans le vide aux portes grandes ouvertes de la rame, ne semblant pas forcement se connaître mais partageant une sorte de conversation collective assez gaie et mise en musique par l’un d’entre eux, peu soucieux de son niveau de batterie de portable. J’arrive un peu paumé et de plus en plus cassé à Church Gate, visite quelques chambres sur Colaba et m’écroule enfin à 11 h du mat’ dans l’une d’elle après avoir posé mes 15k de bagage et épongé tout autant de sueur.
Mon pom’ arrive demain, je bosse un peu l’itinéraire chambre-aéroport et me fait enrôler dans le tournage d’une pub le sur lendemain à Bolliwood. En entendant les négociations entre le rabatteur et d’autres occidentaux dans le couloir de l’hôtel, le rabatteur a besoin de plein d’entre nous, je tente ma chance en sortant ma tête de la porte et me fais engager pour 500 roupies pour faire de la figuration dans une pub de 7h à 2h de l’aprem. On m’avait dit que ça arrivait tout le temps mais je ne pensais pas que ça m’arriverait le premier jour quand même, bref, je suis ravi et impatient de dire ça à Émilie, qui n’en fini pas d’arriver.